« Car vous êtes sauvés par la grâce, par la foi ; et cela ne vient point de vous c'est le don de Dieu ; non point par les oeuvres, afin que personne ne se glorifie. » (Éphésiens 2.8-10)
Prenez celui auquel l'Évangile se complaît le plus, et par lequel je commençais : les bonnes oeuvres fruit du salut, comme le raisin est le fruit de la vigne.
Le fruit n'est-il pas ce que cherche le vigneron, et la fin qu'il se propose ?
La grappe chargée de son jus précieux est le produit naturel du cep, elle en est l'aimable ornement, elle en est la marque distinctive, mais elle est plus que tout cela : elle en est la fin ; le jardinier n'a planté la vigne et ne la cultive que pour obtenir le raisin, si bien que s'il eût connu quelque autre moyen de le posséder, il se fût épargné les soins infinis où il consume sa vie.
Oh ! Que les bonnes oeuvres sont donc inhérentes au salut gratuit, puisqu'elles l'ont déterminé dans la Pensée Divine, et que Dieu n'a voulu avoir des rachetés que pour avoir des saints !
Des saints, n'est-ce pas le nom de prédilection qu'il donne à Ses Enfants pour les distinguer d'avec ceux du siècle ?
Au reste, ce n'est pas seulement en cet endroit que le rapport des oeuvres à la Grâce se découvre ; il est marqué souvent ailleurs, surtout dans les lettres de notre Apôtre : car le docteur de la Grâce est aussi le docteur des Bonnes Oeuvres ; et saint Paul est à lui-même son saint Jacques.
Méditez à ce point de vue son épître à Tite.
Au second chapitre, après avoir pressé tour à tour toutes les classes de chrétiens, jeunes et vieux, libres et esclaves, de s'appliquer aux bonnes oeuvres qui leur sont propres, toujours en s'appuyant de ce même argument présenté sous les formes les plus variées :
« pour honorer la Doctrine de Dieu Notre Sauveur, »
il résume sa pensée là-dessus dans une conclusion qui a de profondes analogies avec mon texte :
« Car la grâce de Dieu, salutaire à tous les hommes, a été manifestée, nous enseignant »
Quoi ?
« Que renonçant à l'impiété et aux passions mondaines, nous vivions dans ce présent siècle sobrement, justement et religieusement. En attendant la bienheureuse espérance et l'apparition de la gloire du grand Dieu, et notre Seigneur Jésus-Christ, qui s'est donné soi-même pour nous. >
Pourquoi ?
« Afin qu'il nous rachetât de toute iniquité, et qu'il nous purifiât, pour lui être un peuple qui lui appartienne en propre, et qui soit zélé pour les bonnes oeuvres » (Tite 2.11-14).
Poursuivons ; il n'a pas fini :
« Avertis-les d'être soumis aux principautés et aux puissances, d'obéir aux gouverneurs, d'être prêts à faire toutes sortes de bonnes oeuvres ; de ne médire de personne, de n'être point querelleurs, mais doux, et montrant une parfaite douceur envers tous les hommes. Car nous étions aussi autrefois insensés, rebelles, égarés, asservis à diverses convoitises et voluptés ; vivant dans la malice et dans l'envie, dignes d'être haïs, et nous haïssant l'un l'autre. Mais quand la bonté de Dieu notre Sauveur, et son amour envers les hommes, ont été manifestés, il nous a sauvés, non par des oeuvres de justice que nous eussions faites, mais selon sa miséricorde, par le baptême de la régénération et le renouvellement du Saint-Esprit, lequel il a répandu abondamment en nous par Jésus-Christ notre Seigneur. Afin qu'ayant été justifiés par sa grâce, nous soyons les héritiers de la vie éternelle selon notre espérance, »
Voilà le but prochain...et voici le but final :
« Afin que ceux qui ont cru en Dieu aient soin les premiers de s'appliquer aux bonnes oeuvres. »
Allez, maintenant ; vous avez de quoi répondre à ceux qui vous accusent de compromettre les bonnes oeuvres en prêchant le salut par la Grâce.
Oui, comme saint Paul a compromis la sainteté de ses disciples par sa doctrine, ou sa sainteté personnelle par sa foi ; ou comme on compromet l'espoir de la récolte en plantant et en taillant la vigne, l'espoir de la moisson en labourant et en ensemençant la terre.
Mais au reste, l'intérêt apologétique est ici bien secondaire : j'ai un plus sérieux objet en vue.
Ce n'est pas seulement pour que vous ayez de quoi répondre ou aux ignorants que je veux que vous vous appliquiez aux bonnes oeuvres : c'est pour que vous ne renversiez pas l'Ouvrage de Dieu, c'est pour que vous ne refusiez pas à Jésus-Christ le Fruit qu'Il attend de vous (Esaïe 5.4 ; Matthieu 21.19).
Les bonnes oeuvres ?
Eh ! Vous n'avez pas été sauvés pour autre chose !
Si vous ne marchez pas dans les bonnes oeuvres, Dieu a manqué Son But en vous sauvant, aussi réellement que le jardinier a manqué le sien en chargeant son précieux terrain d'un plant stérile :
« Coupe-le ; pourquoi charge-t-il la terre ? »
Allez, vous dis-je, marchez dans les bonnes oeuvres ; Dieu ne vous a pas rachetés pour autre chose ! (…)
La Grâce ou l’oeuvre du Père par Adolphe Monod, (Suite partie 5)
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