« Dieu les a tous renfermés dans la désobéissance, pour faire miséricorde à tous ». (Romains 11,32)
(Suite du sermon traitant de La misère de l'homme )
Ce texte réduit la doctrine de la Bible à ses deux articles fondamentaux :
la misère de l’homme et la Miséricorde de Dieu.
La première partie a été traité en établissant la misère de l’homme.
Traitons dans la seconde partie la Miséricorde de Dieu en montrant le remède à cette misère dans la Miséricorde de Dieu.
Pour bien comprendre, il faut avoir présent à l’esprit le premier sermon auquel il fait suite, et qu’en conséquence je commencerai par résumer.
Le texte de ce premier discours était le premier paragraphe du texte entier :
« Dieu les a tous renfermés dans la désobéissance. »
J’avais commencé par éclaircir mon texte, et montré que la pensée qui y est contenue peut être exprimée dans les termes suivants :
Dieu a déclaré que tout homme, dans son état naturel, est pécheur.
Ce n’est pas que tout homme soit vicieux, ce qu’on ne pourrait dire sans une sorte de contradiction dans les termes, parce que le vice est une distinction ; mais c’est que tout homme est dans un état d’égarement, qui consiste en ce qu’il doit aimer Dieu par-dessus tout et qu’il aime dans son état naturel autre chose plus que Dieu.
J’avais établi ces deux points, en premier lieu, par l’Ecriture.
Car, d’une part, elle rapporte toute la Loi de Dieu au précepte fondamental d’aimer Dieu par-dessus tout, auquel elle subordonne tous les autres devoirs, même l’amour du prochain ; d’autre part, elle enseigne que l’homme aime naturellement autre chose plus que Dieu, et cela non-seulement par des déclarations isolées, mais par son ensemble et dans les endroits où elle développe ses principes le plus complètement, en particulier dans les trois premiers chapitres de l’épître aux Romains.
En second lieu, par la raison.
Car, d’une part, elle montre Dieu à l’homme comme Souverainement Aimable, soit en Lui-même, soit surtout dans les rapports qu’Il soutient avec nous, et que j’ai concentrés dans celui de Créateur à créature ; rapport tel qu’il doit dominer toute notre existence, et que l’homme ne peut cesser d’aimer Dieu par-dessus tout sans que tout en lui soit bouleversé.
D’autre part, il ne faut qu’imaginer ce que serait notre vie si nous aimions Dieu par dessus tout, pour reconnaître que l’homme naturel ne l’aime pas de la sorte, et qu’il ne Lui accorde qu’une estime froide, réservant son premier amour pour quelque autre objet :
-
la plupart pour le monde : les pécheurs mondains ;
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plusieurs pour les affections du cœur : les pécheurs affectueux ;
-
quelques-uns pour la conscience séparée de Dieu, et dès lors faussée : les pécheurs vertueux.
Ainsi, au nom de la raison comme au nom de la Bible, nous avions conclu avec saint Paul que l’homme, dans son état naturel, est pécheur.
Voilà le triste résultat où nous a conduits mon premier discours.
A celles et ceux à qui Dieu m’a fait la Grâce de persuader que leur état naturel est un état de péché, et qui, ne se rappelant à aucune époque de leur vie une conversion, c’est-à-dire un passage d’une première direction à une direction nouvelle, sont contraints de convenir avec eux mêmes qu’ils sont encore dans leur état naturel, dans leur état de péché, vous ne pouvez pas, si vous êtes sages, avoir un moment de tranquillité que vous n’en soyez sortis.
Car cet état est doublement mauvais : c’est un état de condamnation, et c’est un état de misère.
C’est un état de condamnation, où vous êtes exposés aux justes châtiments de Dieu, parce que vous êtes coupables, ce que je n’essayerai point d’établir par des raisonnements, mais que vous sentez si vous avez une conscience et une mémoire.
Mais c’est aussi un état de misère, où vous êtes déjà malheureux par votre péché, quand Dieu ne devrait pas vous punir pour votre péché ; et où Dieu Lui-même ne peut pas vous rendre heureux, parce qu’Il ne peut pas faire qu’une chose soit à la fois et ne soit pas, que vous soyez à la fois pécheurs, et par conséquent opposés à Sa Volonté, et heureux, c’est-à-dire contents de Son Administration.
Ainsi, également coupables et misérables, également indignes et incapables d’être heureux, vous avez besoin d’être délivrés et de la peine du péché, et du péché lui-même.
Jusque-là, il n’y a point pour vous de bonheur possible, et ce que vous appelez de ce nom n’est qu’étourdissement.
Cette double délivrance, la chercherez-vous en vous-mêmes ?
Vous ne tarderiez pas à reconnaître par l’expérience, ce qu’au reste vous pouvez reconnaître d’avance par la seule réflexion, que vous l’y chercheriez en vain.
Vous ne pouvez pas vous délivrer de la peine du péché car, vous ne pouvez pas effacer le crime de votre désobéissance première par une obéissance tardive, qui, pût-elle même être parfaite, ne pourrait cependant être surérogatoire et fournir du surplus à reverser sur le passé.
Vous ne pouvez pas non plus vous délivrer du péché lui-même car, quelque résolu que vous soyez d’obéir désormais à Dieu, comme une terre imprégnée de sucs malfaisants ne peut pousser des herbes salutaires, ainsi la chair, dit Jésus-Christ, ne peut enfanter que la chair (Jean 3-6) , c’est-à-dire le péché ne peut pas produire la Sainteté, ni votre volonté mauvaise réformer votre volonté mauvaise.
En sorte que, n’ayant point d’espoir en vous-mêmes et forcés d’en chercher ailleurs, vous vous écriez avec angoisse :
Et qui donc me délivrera ?
Dieu.
Il n’accuse votre état de péché, que parce qu’Il veut vous en délivrer.
Il ne vous « a renfermés dans la désobéissance », que « pour vous faire Miséricorde ».
Ainsi vous assure Sa Parole ; et voici le Plan que Sa Miséricorde a arrêté pour votre délivrance, tel que nous le révèle cette même Parole.
Je dis tel que nous le révèle Sa Parole car je ne veux, dans l’exposé qui va suivre, que vous présenter les pensées de la Bible, sans solliciter l’approbation de la raison humaine ; étant trop manifeste que pour délivrer l’homme pécheur Dieu n’aura pas pris conseil de l’homme pécheur, et qu’Il sera entre dans « des voies au-dessus de nos voies et dans des pensées au-dessus de nos pensées »
(Esaïe 55.8. Ce verset, que l’on applique invariablement à la doctrine des afflictions, se rapporte dans la pensée du prophète à la doctrine du pardon gratuit : le contexte ne laisse aucun doute à cet égard)
La raison a pu, quand il s’est agi d’établir notre misère naturelle, être appelée à joindre son faible suffrage à la Toute-Puissante Autorité de Dieu.
La raison a sa manière de constater le besoin que nous avons de l’Évangile, et les signes de divinité que cet Évangile porte avec lui.
Mais quand elle a fait cela, elle a fait toute son œuvre : son témoignage est épuisé.
Qu’elle rentre aujourd’hui dans son silence ; qu’elle écoute Dieu qui va parler, et ne prétende pas juger Son Juge.
Et Toi, Ô Seigneur, Déploie librement aux yeux de celle ou celui qui lit « Ta Folie, plus Sage que la sagesse des hommes »(1 Colossiens 1.25), et par laquelle Il T’a plu et plaira de les sauver !
Et d’abord tous les prophètes de l’Ancien Testament annoncent, et l’Evangile s’ouvre en proclamant, une dispensation de la Miséricorde Divine, si consolante pour l’homme pécheur et à laquelle il avait si peu droit de s’attendre, qu’elle a donné à l’Evangile son nom qui signifie bonne nouvelle.
La première des deux délivrances que vous cherchez vous est acquise :
Dieu consent à vous remettre la peine de vos péchés ; Il vous pardonne.
Ce n’est pas que la condamnation que votre conscience prononce contre vous ne soit juste selon la Bible,loin de l’infirmer, elle la prononce au contraire à son tour avec plus de force encore.
Pour n’en citer qu’un seul exemple, dans ce même chapitre de l’épître aux Romains où nous lui avons entendu déclarer, que tout homme est pécheur, elle déclare aussi que tout pécheur est « inexcusable » (Romains 1.20), ce qu’elle démontre par la manière dont s’est développée la corruption des peuples anciens ; et cette démonstration, bien qu’elle soit prise dans l’histoire des populations, non des individus, s’applique cependant aussi dans la conclusion de saint Paul à chaque homme en particulier, parce que l’histoire des populations se retrouve en miniature dans l’histoire des individus.
Car, de même que la corruption de ces peuples avait commencé parce qu’ils avaient volontairement fermé les yeux à la Lumière, telle quelle, que Dieu leur avait accordée, et par là contraint Dieu de leur retirer cette lumière et de les abandonner à leurs ténèbres, qui les livrèrent aux plus effroyables débordements.
Ainsi tout homme sincère reconnaîtra qu’il a lui-même nourri le péché dans son cœur, parce qu’il a volontairement repoussé les premières lumières, telles quelles, que Dieu lui avait données, et par là contraint Dieu de lui retirer ces lumières et de l’abandonner à son ignorance, qui l’a livré au péché.
C’est pourquoi, selon saint Paul, tout homme est coupable et a perdu irréparablement « la justification par les œuvres », c’est-à-dire la vie éternelle méritée par une conduite conforme à la loi de Dieu.
(Note Refuge Protestant : Christ est le Seul Chemin menant au pardon de Dieu malgré le désir sincère et profond d’amis Juifs à revenir à la Thora seule, ce qui est au premier abord une bonne chose. Mais elle amènera inévitablement à Christ pour toute âme attirée par Dieu. Christ est le Messie promis venue non pour abolir la Loi mais accomplir sur la croix ce que Dieu avait annoncé et promis. Pour Israël premièrement, puis aux païens que nous étions. On peut dès lors s’étonner du pape actuel de l’exonération gravissime que s’octroie le vatican en écartant le peuple Juif et Israël de la Grâce et Salut !?!...)
Mais maintenant, ajoute saint Paul, Dieu, voyant que nul homme n’était arrivé ni ne pouvait arriver désormais à l’éternité bienheureuse par cette première voie, en ouvre une autre toute différente, et propose à l’homme « la justification par la Foi », c’est-à-dire, la vie éternelle accordée comme une Grâce à un coupable.
Pourquoi ?
Par cela seul qu’Il est Miséricordieux, « gratuitement par Grâce » (le pléonasme est de saint Paul)Romains 3.23, non pour aucun mérite ni pour aucune dignité qui soit dans l’homme, mais malgré tout son démérite et toute son indignité.
Et comment ?
Par la Rédemption qui est en Jésus-Christ.
« Christ est l’Agneau de Dieu qui ôte le péché du monde. – Il est la propitiation pour nos péchés, et non-seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux de tout le monde. – Il a porté nos péchés en Son Corps sur le bois. II s’est chargé de nos maladies ; Il a pris sur Lui nos langueurs. Il a été navré pour nos forfaits ; Il a été froissé pour nos iniquités ; par Ses Meurtrissures nous sommes guéris. Nous avons tous été errants comme des brebis qui se sont détournées chacune dans son propre chemin ; mais l’Éternel a fait venir sur Lui l’iniquité de nous tous, et a fait tomber sur Lui le châtiment qui nous apporte la paix. »(Jean 1.29 ; 1 Jean 2.2 ; 1 Pierre 2.24 ; Esaïe 53.4-6)
Mes frères et mes soeurs, ne tordons point les Ecritures : ces déclarations ne peuvent avoir qu’un sens.
Jésus-Christ a souffert, en notre place, la mort que nous avons tous méritée, pour que nous puissions recevoir, en faveur de Lui, la vie éternelle qu’Il a méritée Lui Seul.
Dieu traite Son Fils Innocent comme s’Il était aussi coupable que l’homme, pour pouvoir traiter l’homme coupable comme s’il était aussi innocent que Son Fils.
Il veut ainsi « éloigner de nous nos péchés autant que l’orient est éloigné de l’occident, les jeter au fond de la mer, ne s’en plus souvenir » (Psaume 103 ; Hb 8.12), nous relever de notre état de condamnation.
C’est ici surtout qu’il faut vous souvenir que je n’en appelle qu’à l’Autorité de la Bible.
Je n’en appelle pas au suffrage de la raison, que peut-être et certainement je n’obtiendrais pas, et dont aussi je n’ai pas besoin, parce que j’expose non mes pensées, mais les Pensées de Dieu, et les expose revêtues non de mon langage, mais du langage de la Bible Sainte.
Que si vous me demandez quel rapport lie le pardon de nos péchés avec la mort de Jésus-Christ ; par quelle étrange séparation la Justice Divine se satisfait en punissant le péché, sans punir le pécheur ; et comment Dieu frappe l’innocent en la place du coupable, et pardonne au coupable en faveur de l’innocent?
Je n’ai qu’un mot à répondre : Je ne sais pas.
Et si vous désiriez de moi un discours où la rédemption fût expliquée, je prendrais exemple de ce philosophe de l’antiquité de qui on avait désiré une définition de Dieu.
Je vous demanderais d’abord une semaine pour préparer ce discours ; après cette semaine écoulée, je vous en demanderais une seconde ; après la seconde, une troisième ; et ainsi de suite jusqu’à ce que je vous eusse enfin déclaré que je ne le terminerais jamais.
Car plus ce philosophe méditait sur Dieu, moins il pouvait Le définir ; et moi, plus je médite sur la Rédemption, moins je puis l’expliquer.
Mais, quoique je ne puisse pas expliquer la rédemption directement, j’ai une manière indirecte de l’expliquer ; quoique je ne puisse pas, la concevoir en elle-même et par ce qui la constitue, je la conçois en quelque sorte par ce qui la précède et par ce qui la suit :
Par ce qui la précède, je veux dire par le besoin de ma conscience auquel elle répond ; et par ce qui la suit, je veux dire par la paix qu’elle y rétablit.
Quand Dieu sollicité par Moïse « de lui faire voir Sa Gloire, fit passer devant ses yeux toute Sa Bonté », Moïse sut, avant que Dieu eût passé, qu’il allait passer, et après que Dieu eut passé, qu’il avait passé ; mais dans le temps qu’Il passait, il ne Le vit point, parce que Dieu, dit l’Ecriture, l’avait couvert de Sa Main. »( Exode 33.18-23 )
De même de la Rédemption, Dieu passe devant nous, sacrifiant Son Fils pour l’expiation de nos péchés.
Dans le temps que le sacrifice s’accomplit, nous ne voyons rien : Dieu a mis Sa Main sur nos yeux.
Mais avant qu’il s’accomplisse, nous Le contemplons dans le pressentiment de notre conscience angoissée ; et, après qu’il a été accompli, Dieu ôte Sa Main, et nous Le contemplons dans la paix qu’Il nous a rendue.
Contenions-nous. Ne soyons pas assez déraisonnables pour nous étonner que Dieu n’ait pas voulu, ou n’ait pas pu, dans notre état actuel, nous tout éclaircir.
Un jour viendra que « nous connaîtrons comme nous fûmes connus » (1 Co 13.12)
En attendant, croyons Dieu sur Parole ; acceptons la Bonne Nouvelle comme une Nouvelle.
Dieu consent à pardonner tout à tous, en considération de Jésus-Christ qui a souffert tout pour tous.
Mais c’est en vain que le pécheur est délivré de la peine du péché, s’il n’est délivré du péché lui-même.
Aussi Dieu nous offre-t-il encore cette seconde délivrance.
Dans le même temps qu’Il nous pardonne, et, ce qui est admirable, par le même moyen, Il dépose dans notre âme le germe de la Sainteté, selon cette parole profonde du Psaume 103 : « Il y a pardon auprès de toi, a afin que tu sois craint. » Psaume 103.4
La seconde partie du plan de la Miséricorde Divine, celle qui a pour objet de délivrer l’homme du péché lui-même, en d’autres termes de le ramener à aimer Dieu de son premier amour, est conçue sur un principe divinement simple et fécond, qu’on peut appeler la théorie de la sanctification véritablement évangélique :
L’amour ne se commande pas ; il naît, sans effort, à la vue de certaines qualités qui l’attirent d’elles-mêmes.
Si un être nous paraît dépourvu de ces qualités, s’il ne nous paraît pas aimable, nous ne pouvons pas l’aimer quoi que nous fassions.
Si au contraire un être nous paraît doué de ces qualités, s’il nous paraît aimable, non-seulement nous l’aimerons sans effort, mais nous ne pourrons pas ne pas l’aimer.
Si donc nous péchons, si nous n’aimons pas Dieu, c’est que Dieu ne nous paraît pas aimable.
Mais si Dieu ne nous paraît pas aimable, c’est que nous ne Le connaissons pas.
Car si nous Le connaissions, nous saurions qu’Il possède, au plus haut degré, de toutes les qualités la plus propre à Lui attirer notre amour : un Grand Amour pour nous.
« Quiconque pèche » dit saint Jean, « n’a point connu Dieu ; car Dieu est Amour » 1 Jean 3.6 ; 4.8
Il ne faut donc, pour ramener l’homme à aimer Dieu, que lui faire connaître combien Dieu l’aime.
Dans ce dessein Dieu, pour manifester aux hommes Son Vrai Nom qui est celui de Père, leur a envoyé Son Fils Jésus-Christ, qui Seul ayant demeuré de tout temps dans le Sein de Dieu, Seul a vu Dieu, et Seul connaît tout ce qu’il y a en Lui de Paternel.
Que Jésus-Christ a bien rempli Cette Mission !
Et qu’il est impossible de contempler Le Fils et de douter de l’Amour du Père ! (...)
Suite la Miséricorde de Dieu (partie 2)
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