Fixant les yeux sur Jésus
(Hébreux 12 v. 2)
de Theodore Monod,
1874
Seulement 5 mots très courts, mais dans ces 5 mots, il y a tout le secret de la vie.
Fixant les yeux sur Jésus et non pas sur la loi.
La loi donne des commandements, mais non pas la force de les accomplir ; la loi condamne toujours, et ne pardonne jamais. Si nous nous remettons sous la loi, nous nous écartons de la grâce. Dès que nous faisons de notre obéissance le moyen de notre salut, nous perdons la paix, la joie, la force, car nous avons oublié que Jésus est la fin de la loi pour justice à tout croyant (Rom. 10:4). Dès que la loi nous contraint de chercher en Lui notre seul Sauveur, alors il n’appartient qu’à Lui le droit de nous commander, et ce n’est qu’à Lui que l’obéissance est due : cette obéissance n’inclut rien moins que notre coeur tout entier, et nos pensées les plus secrètes, mais elle a cessé d’être un joug de fer ou un fardeau insupportable, ce n’est qu’un joug aisé et un fardeau léger (Matt. 11:30). Une obéissance qu’Il rend pleine de délices sans nous obliger moins ; une obéissance qu’Il inspire en même temps qu’Il exige ; une obéissance qui est à la fois une conséquence du salut et une partie de ce salut, — et, comme tout le reste, elle est librement donnée ;
Fixant les yeux sur Jésus et non pas sur ce que nous faisons pour Lui.
À trop être occupé de l’oeuvre, on oublie le Maître — on peut avoir les mains pleines et le coeur vide. Si nous sommes occupés du Maître, nous ne pourrons pas oublier l’oeuvre ; si le coeur est plein de Son amour, comment être inactif à Son service ?
Fixant les yeux sur Jésus et non pas sur le succès apparent de nos efforts.
L’apparence du succès, n’est pas la mesure du vrai succès ; en outre, Dieu ne nous demande pas de réussir, mais de travailler ; Il nous demande compte de notre travail, pas de nos réussites — pourquoi donc nous en faire du souci ? À nous de répandre la semence, à Dieu de récolter le fruit ; si ce n’est pas aujourd’hui, ce sera demain ; s’Il ne nous emploie pas pour récolter, Il emploiera autrui. Même quand le succès est garanti, il est dangereux d’en être occupé : d’une part nous sommes tentés de nous en attribuer quelque mérite, et d’autre part, nous prenons l’habitude d’être moins zélé quand nous ne voyons plus de résultat, alors que ce serait justement le moment de redoubler d’énergie. Regarder au succès, c’est marcher par la vue ; regarder à Jésus, et persévérer en Le suivant et Le servant malgré tous les sujets de découragements, c’est cela marcher par la foi ;
Fixant les yeux sur Jésus et non pas sur les dons spirituels reçus, présents ou futurs.
La grâce d’hier était pour le travail d’hier, elle est passée ; on ne peut plus en tirer parti, ou s’y attarder. La grâce d’aujourd’hui est donnée pour le travail d’aujourd’hui ; elle nous est confiée non pour la regarder, mais pour en faire bon usage. On ne peut la contempler comme un trésor, en comptant ses richesses, mais il faut la dépenser immédiatement, et rester pauvre, « fixant les yeux sur Jésus » ;
Fixant les yeux sur Jésus et non pas sur la somme de douleurs
par lesquelles nos péchés nous ont fait passé, ou à la somme d’humiliations causées par ces péchés. Si seulement nous en étions humiliés au point de ne plus être satisfaits de nous-mêmes ; si seulement nous en étions troublés au point que cela nous fasse regarder à Jésus pour qu’Il nous en délivre : c’est tout ce qu’Il demande de nous ; et ce sont aussi ces yeux fixés sur Jésus qui, plus que tout autre chose, font jaillir les larmes et chuter l’orgueil. Et quand il nous est donné, comme à Pierre, de pleurer amèrement (Luc 22:62), oh ! que nos yeux obscurcis par les larmes puissent alors, plus que jamais, rester fixés sur Jésus ; et même notre repentance peut devenir un piège si nous imaginons pouvoir, en quelque manière, ôter ces péchés par nos larmes, ce que seul le sang de l’Agneau de Dieu peut faire ;
Fixant les yeux sur Jésus et non pas sur notre joie, même brillante,
ni sur la force de notre assurance, ni sur la chaleur de notre amour. Sinon, dès que l’amour se refroidit tant soit peu, dès que cette assurance se dissipe, dès que la joie fait défaut, — soit en raison de notre faiblesse ou de l’épreuve de notre foi, — ayant ainsi perdu ces émotions intérieures, nous pensons de suite que nous n’avons plus de force, et nous nous laissons aller à un abîme de douleur, ou même à une oisiveté peureuse, ou à des plaintes coupables. Ah ! qu’il vaudrait mieux nous souvenir, que si la douceur des sentiments fait défaut, la foi et sa force demeurent avec nous. Pour être en mesure de toujours abonder dans l’oeuvre du Seigneur (1 Cor. 15:58), fixons les yeux sur Jésus, non pas sur nos coeurs changeants, car Lui demeure le même ;
Fixant les yeux sur Jésus et non pas au degré de sainteté auquel nous sommes parvenus.
Si quelqu’un ne s’estime pas être un enfant de Dieu tant qu’il voit encore une tache sur son coeur, et des pierres d’achoppements dans sa vie, qui pourra jamais goûter la joie du salut ? Cette joie ne s’achète pas à prix d’argent. La sainteté est le fruit, non pas la racine de la rédemption. C’est l’oeuvre de Jésus Christ pour nous qui nous réconcilie avec Dieu ; c’est l’oeuvre du Saint Esprit en nous qui nous renouvelle à Sa ressemblance. C’est vrai qu’une foi, même réelle, mais qui n’est pas encore affermie, a des carences et ne porte pas beaucoup de fruit, mais cela n’amoindrit point la perfection de l’oeuvre du Seigneur, ni la certitude de ses promesses immuables, ni la garantie de la vie éternelle à quiconque se confie en Lui. Et ainsi, se reposer dans le Rédempteur est le sûr moyen de Lui obéir ; et l’âme ne peut faire face à des conflits que lorsqu’elle jouit de la paix du pardon. — Si, par manque de scrupule, quelqu’un abuse de cette vérité bénie pour se livrer à l’oisiveté spirituelle, s’il s’imagine pouvoir remplacer la sainteté qu’il n’a pas par la foi qu’il pense avoir, qu’une telle personne se rappelle les avertissements solennels de l’apôtre Paul : « ceux qui sont du Christ ont crucifié la chair avec ses passions et ses convoitises » (Gal. 5:24), ainsi que de l’apôtre Jean : « celui qui dit : je le connais, et qui ne garde pas ses commandements, est menteur, et la vérité n’est pas en lui » (1 Jean 2:4), et aussi l’avertissement du Seigneur Jésus lui-même : « tout arbre qui ne porte pas de bon fruit est coupé et jeté au feu » (Matt. 7:19) ;
Fixant les yeux sur Jésus et non pas sur nos défaites ou sur nos victoires.
Si nous regardons à nos défaites, nous serons abattus ; si nous regardons à nos victoires, nous serons enflés d’un vain orgueil. Ni l’un ni l’autre ne nous aidera à combattre le bon combat de la foi (1 Tim. 6:12). Comme toutes nos bénédictions, la victoire et la foi qui la gagne, sont un don de Dieu par notre Seigneur Jésus Christ (1 Cor. 15:57), et à Lui revient toute la gloire ;
Fixant les yeux sur Jésus et non pas sur nos doutes.
Plus nous regardons à ces doutes, plus ils paraissent immenses, jusqu’à engloutir notre foi, notre force et notre joie. Mais si nous en détournons nos regards pour les fixer sur notre Seigneur Jésus, Lui qui est la Vérité (Jean 14:6), les doutes seront dissipés par la lumière de Sa présence comme les nuages sous l’effet du soleil ;
Fixant les yeux sur Jésus et non pas sur notre foi.
Le dernier artifice de l’adversaire quand il ne peut pas nous amener à regarder ailleurs, est de détacher nos yeux de notre Sauveur pour les tourner vers notre foi, et alors, soit de nous décourager si elle est faible, soit de nous enorgueillir si elle est forte : dans tous les cas, nous en sortons affaiblis. Car la puissance ne vient pas de la foi, mais du Sauveur par la foi. Il ne s’agit pas de regarder à ce que nous paraissons, mais de fixer les yeux sur Jésus ;
Fixant les yeux sur Jésus et c’est de Lui et en Lui que nous apprenons
à connaître ce qu’il nous faut savoir du monde, de nous-mêmes, de nos douleurs, des dangers qui nous guettent, de nos ressources et de nos victoires ; de Lui et en Lui, nous l’apprenons sans danger, et pour le profit de nos âmes ; il s’agit de tout voir dans la vraie lumière, parce qu’Il est Celui qui nous montre ces choses ; et Lui choisira le moment opportun et la mesure appropriée de connaissance de ces choses, pour que soient produits les fruits d’humilité, de sagesse, de gratitude, de courage, de vigilance et de prière. Tout ce qu’il est désirable que nous connaissions, le Seigneur Jésus nous l’enseigne ; tout ce que nous n’apprenons pas de Lui, il vaut mieux que nous ne le sachions pas ;
Fixant les yeux sur Jésus tant que nous restons sur la terre,
les yeux fixés sur Jésus à tous les instants, sans nous laisser distraire par les souvenirs du passé — il nous faut le laisser derrière — ni par l’occupation du futur — nous n’en savons rien ;
Fixant les yeux sur Jésus MAINTENANT si nous n’avons encore jamais regardé à Lui
Fixant les yeux sur Jésus DE NOUVEAU si nous avons eu une éclipse
Fixant les yeux sur Jésus SEULEMENT
Fixant les yeux sur Jésus ENCORE
Fixant les yeux sur Jésus TOUJOURS
en le fixant toujours plus constamment, avec toujours plus de confiance, « étant transformés en la même image, de gloire en gloire » (2 Cor. 3:18), attendant ainsi l’heure où nous serons appelés à passer de la terre au ciel, du temps à l’éternité, — heure promise, heure bénie, — quand enfin nous lui serons semblables, car nous le verrons comme Il est (1 Jean 3:2).
DÉSORMAIS
Ne regardons pas à nous-mêmes
Oh la honte et la douleur amères
Qu’il ait jamais pu exister un temps
Où j’ai laissé la compassion du SAUVEUR
Plaider en vain ! et où j’ai répondu fièrement :
« Tout de moi et rien de Toi »
Et voilà qu’Il m’a trouvé quand même :
Je l’ai vu saignant sur le bois maudit
Je l’ai entendu prier et dire : « Père pardonne leur »
Et mon coeur a murmuré, à regret :
« Un peu de moi et un peu de Toi »
Jour après jour Sa tendre miséricorde
Guérissait, aidait sans mesure et sans limite,
Douce et forte, si patiente, hélas !
Elle m’a amené plus bas encore, et je susurrais alors :
« Moins de moi, et plus de Toi »
Plus haut que les plus hauts cieux,
Plus profond que la mer la plus profonde,
Seigneur, ton amour m’a finalement conquis ;
Accorde-moi maintenant ma supplication :
« Rien de moi, et tout de Toi »
Amen,
Pasteur Theodore Monod,
(1874)
Source : bibliquest.org