Les hommes opposent l’amour de Dieu à sa sainteté et préfèrent davantage parler de pardon que de repentance, pourtant au cœur du message évangélique.
Il est certes plus aisé de nous réjouir et nous glorifier de la grâce que d’écouter ses enseignements.
Personne ne veut songer un instant que Dieu condamne l’homme pour ses péchés, pourtant chacun se permet de juger si facilement du péché des autres, d’autant plus s’il en est victime…
Dieu manifeste son amour et sa bonté envers nous afin de nous conduire à la repentance et non à une vie laxiste de péché qui l’offense. Exploiterions-nous son amour pour justifier notre méchanceté ?
A l’instar des contemporains de Jean-Baptiste, beaucoup d’hommes considèrent la repentance comme un moyen de « fuir la colère à venir ».
Certains ayant compris le principe religieux disent « marcher dans la lumière » en allant se confesser au pasteur comme on irait consulter son psychiatre.
Nous pensons tromper Dieu par notre rituel sans recevoir sa lumière qui éclaire ce qui gît au fond du cœur : les fruits de la repentance sont absents.
Qui, de l’élan spontané d’un cœur déchiré, osera se frapper la poitrine pour dire au Seigneur comme le publicain : « O Dieu, sois apaisé envers moi pauvre pêcheur » ?
L’illusion d’être juste est tellement ancrée au cœur de l’homme que même sa repentance le conforte dans ce qu’il est ; il n’a pas compris qu’il doit changer.
Puisqu’il est pardonné, autant continuer à pécher !
Nous pouvons demander pardon tous les jours, dans cet esprit : nous ne serons pas pardonnés. Dieu n’est pas séduit par nos bons sentiments religieux.
L’épisode où le peuple d’Israël a festoyé autour d’un veau d’or illustre parfaitement cette illusion.
Par ce mélange d’idolâtrie et de divertissement, ils pensaient adorer Dieu !
Lorsqu’il nous arrive aujourd’hui de dénoncer l’idolâtrie des statues ou des icônes selon ce que la Parole nous enseigne, les chrétiens ayant compris que l’idolâtrie ne se limitait pas à celle des statues matérielles rétorquent aussitôt : « mais nous avons tous des idoles » !
Comment peut-on avancer un tel argument avec autant de légèreté lorsque l’on considère ce que la Bible dit : « les idolâtres n’hériteront pas le royaume » !
En le disant ainsi sans repentance, réalisons-nous que nous sommes perdus ?
Si j’ai des idoles alors je dois impérativement m’en repentir et les abandonner car, comment pourrais-je encore m’approcher de Dieu sans purifier mon cœur ?
Oserais-je brandir ainsi mon péché pour nuancer, voire justifier celui des autres ?
Voilà l’hypocrisie de l’homme religieux prenant sa connaissance comme paravent pour cacher son péché.
La religion pense faire l’économie de la repentance, la véritable connaissance de Dieu nous y conduit.
Plutôt que d’argumenter par de tels propos, mieux vaut reconnaître que nous n’avons pas saisi la gravité du péché et que la connaissance du Seigneur nous manque. C’est ainsi que nous pouvons espérer changer.
Ceux qui n’ont pas été écrasés par l’effondrement de la tour de Siloé n’étaient pas plus justes que ceux qui se sont retrouvés dessous[1], mais Jésus utilise l’exemple pour exhorter à la crainte et la repentance.
Si nous n’abandonnons pas notre péché tout en croyant être du bon côté, nous courons le pire des dangers : l’hypocrisie religieuse.
Nous pouvons tirer des conclusions de la bénédiction passagère : puisque tout va bien cela signifie que …. Nous oublions que beaucoup de païens sont en bonne santé alors que parfois ceux consacrent leur vie pour l’œuvre de Dieu ne le sont pas.
D’autres raisonnements aussi légers amènent certains à se dire qu’une fois livrés à leurs passions, ils sont ensuite mieux disposés pour rendre un culte : ils n’ont pas connu l’amour de Dieu.
Quelle femme accepterait qu’on s’amuse avec une autre sous prétexte de mieux l’aimer ensuite ou de dynamiser sa vie sexuelle… ?
Celui qui aime ne supporte pas de faire souffrir, sa sensibilité ne peut le tolérer.
Nos consciences d’hommes religieux mais mondains ont déjà du mal à se repentir des péchés extérieurs pensant qu’avoir l’alliance de Dieu à la bouche et des sacrifices à lui offrir suffisent pour attirer Ses faveurs.
La conscience ainsi se tranquillise jusqu’à ce qu’elle ne ressente plus l’utilité des actions ou des offrandes. Alors vient la lassitude.
Que fait-on lorsque l’on ne sert plus à rien ?
En relisant Le psaume 50 nous découvrons à quel point Dieu n’a pas besoin de nos offrandes.
L’homme a la prétention de faire et d’apporter quelque chose alors que tout appartient à Dieu ! Si nous ne lui avions rien offert, il se serait servi !
Ce que Dieu attend de l’homme c’est qu’il vienne vers lui en demandant, conscient qu’il manque de tout, qu’il n’est qu’homme et que Dieu est Dieu.
« Invoque–moi au jour de la détresse ; Je te délivrerai, et tu me glorifieras ».
Si Dieu peut faire crier les pierres pourquoi aurait-il besoin de moi, que peut- il faire de ce que je lui apporte ?
Nous n’avons rien, ne pouvons rien et avons besoin de tout. Si même nous avions tout, nous manquerions encore de tout si nous ne savons pas aimer. Sans l’amour, je ne suis rien.
Faire un effort pour aimer prouve que l’on n’aime pas ; comment une femme peut elle se contenter des efforts de son mari qui s’applique à l’aimer ?
Où est l’élan spontané du cœur gagné et conquis ?
L’absence d’amour, le dénigrement de l’autre pour justifier son indifférence suscitent rarement le besoin de repentance, et ce sont pourtant les reproches que Dieu fait dans ce psaume 50[2].
Nous dénonçons ce que le monde désapprouve aussi : les péchés extérieurs, la violence, le vol, la trahison, l’infidélité, le meurtre.
Malgré la libre union prônée dans notre génération, la tromperie au sein du couple ne se fait jamais sans crise, sans accusation et culpabilité.
Il y a donc bien une conscience du péché chez tout homme. Mais ce que Dieu met au jour, c’est bien l’état du cœur et, si la loi est observée en tout point à l’extérieur, elle ne justifiera pas celui qui n’aime pas car seul l’amour accomplit toute la loi. Dieu ne reçoit rien de quelqu’un qui n’aime pas.
Les œuvres sans l’amour, aussi belles soient-elles, restent humaines, religieuses : « maudit soit l’homme qui se confie dans l’homme » et qui juge lui-même de ce que Dieu fait.
Sans l’esprit de Dieu nous sommes ramenés à notre nature mauvaise qui gît dans le malin, méchanceté indifférence et mépris. La prise de conscience nous pousse à crier « malheureux que je suis ! Qui me libérera ? »
Celui qui accepte la repentance accepte le jugement de Dieu et s’y soumet car il désespère de lui-même, il ne sait plus.
L’homme religieux décide de ce que Dieu devrait faire dans son amour mais celui qui a le cœur brisé sait qu’il ne peut rien apporter, il a la bouche fermée. Il ne juge plus selon ses critères, ne s’évalue plus car il est perdu mais il s’approche en demandant pardon car son cœur est méchant, sec et vide.
Même mes actes d’amour peuvent se transformer en offense car l’autre sent que je ne l’aime pas sincèrement, qu’en est-il de Dieu qui connaît tout ?
Notre état intérieur se dévoile parfois par une pointe de violence, de bouderie ou un silence froid et impassible, mais Dieu savait bien avant que je ne vivais plus de reconnaissance et de demande.
La repentance consiste à accepter que ma méchanceté ne soit plus cachée par mes sacrifices. Oui, je suis insensible, je ne connais pas l’amour.
Au sein de cette prise de conscience la grâce éclate : comment se fait-il qu’en connaissant ma méchanceté et ma dureté, Dieu m’ait appelé ou qu’il m’ait utilisé ?
J’aurais tellement aimé mériter ou être utile… Mon service est inutile, Dieu l’agrée par grâce parce que je lui ai seulement rendu ce qu’il m’a donné.
C’est la différence entre donner ce que j’ai acquis et donner ce que j’ai reçu de Dieu d’où le sens de « rendre grâce ».
Je ne m’approche pas de Dieu les mains vides mais remplies de ce qu’il m’a donné, j’apporte ma reconnaissance.
« En sacrifice à Dieu, offre la reconnaissance. Accomplis tes vœux envers le Très-Haut. Invoque moi au jour de la détresse ; Je te délivrerai, et tu me glorifieras ».
[1] Luc 13 : 4
[2] V. 20 et 21 « Tu t’assieds et tu parles contre ton frère, tu diffames le fils de ta mère. Voilà ce que tu as fait, et je me suis tu. Tu t’es imaginé que j’étais comme toi, mais je vais te faire des reproches et tout mettre sous tes yeux ».
MT