La cérémonie de “panthéonisation" en présence du président de la République où les cendres de femmes ou hommes illustres dans l'histoire sont reçues avec les plus grands honneurs au Panthéon en signe de reconnaissance de la patrie pour leur action courageuse et/ou patriotique évoque immédiatement une version « laïque » ou « républicaine » de la canonisation de « saints » par un certain nombre d’églises (catholique romaine, orthodoxe russe ou grecque, apostolique arménienne etc.)
Comment, en effet, ne pas être frappé par l’analogie qui existe entre d’une part le long processus menant à la sélection des personnes panthéonisées, l’insistance sur leurs vertus qui les distingue du commun des mortels, la solennité avec laquelle le rituel est conduit, et d’autre part la manière dont les églises sus-mentionnées déclarent « saintes » des croyants qui ont, non pas « bien mérité de la patrie terrestre », mais plutôt « bien mérité de la patrie céleste » ?
Il est évident qu’avec cette analogie, comme de fait avec beaucoup d’autres semblables, l’idéal républicain – aussi laïque qu’il se prétende – reste fortement influencé par cela même dont il tente de se distancier.
Souvent il ne fait qu’imiter ce qu’il pourfend par ailleurs.
Peut-être au fond que cette connivence de rituels et de sacralisation trouve sa source dans un héritage commun : celui des empereurs romains déifiés – à moitié, ou totalement – après leur mort, afin que le souvenir de leur vie et de leur rôle à la tête de l’État impérial continue à servir de ciment pour la préservation de cet État, lui-même divinisé.
Quoiqu’il en soit – et quelle que soit la forme de la reconnaissance collective que l’on témoigne à des hommes ou des femmes qui ont servi la patrie terrestre de manière exceptionnelle – il est nécessaire de se poser la question de savoir qui sont les « saints » que tant d’églises pensent pouvoir mettre sur un piédestal spirituel après leur existence terrestre ?
Que signifie « être saint »?
A qui s’applique ce mot si souvent employé dans la tradition chrétienne?
Pour bien le comprendre, lisons quelques extraits de lettres écrites par l’apôtre Paul, dans la seconde partie de la Bible.
Au début de ses lettres, Paul s’identifie et identifie également ceux à qui il adresse sa lettre.
Par exemple, dans sa lettre aux chrétiens de Rome, il s’adresse à – je cite – :
“tous ceux qui, à Rome, sont bien-aimés de Dieu, appelés à être saints”.
Et il les salue au nom de Dieu de la manière suivante :
“Que la grâce et la paix vous soient donnés de la part de Dieu notre Père et du Seigneur Jésus-Christ !”
Dans la première lettre aux Corinthiens, Paul adresse une salutation semblable à – je cite – l’église de Dieu qui est à Corinthe, à ceux qui ont été sanctifiés dans le Christ Jésus, appelés à être saints avec tous ceux qui invoquent en tout lieu le nom de notre Seigneur Jésus Christ.”
Je pourrais citer d’autres salutations de l’apôtre Paul, comme celle qui ouvre la seconde lettre aux Corinthiens :
“Paul, apôtre du Christ Jésus par la volonté de Dieu, et le frère Sosthène, à l’église de Dieu qui est à Corinthe et à tous les saints qui sont dans l’Achaïe.”
(Précisons que l’Achaïe était une région de la Grèce).
Quoi qu’il en soit, il est clair, au vu de ces passages de la Bible et de dizaines d’autres semblables, que les saints, ce sont tous les chrétiens, quels qu’ils soient, qui ont été appelés à croire en Jésus-Christ, mis à part pour former le peuple de Dieu et qui font partie de l’Église.
Il suffit de lire la première lettre aux Corinthiens pour se rendre compte que ces nouveaux croyants étaient bien loin d’avoir atteint la perfection morale à laquelle ils étaient aussi appelés (lisez en particulier le chapitre 6, versets 9 à 11).
Mais, dans la seconde partie de la Bible, leurs graves imperfections morales ne remettent pas en cause le fait qu’ils aient été mis à part, appelés à croire, donc sanctifiés par Dieu.
Celui-ci les conduit par son Saint Esprit, donc Il les sanctifie progressivement en les appelant à l’obéissance à ses commandements, à un changement de vie qui rompt avec les pratiques païennes dont ils étaient coutumiers.
Il en va de même deux mille ans plus tard, car l’appel de Dieu à croire en l’Évangile est adressé journellement à des myriades d’hommes et de femmes de par le monde.
Toutes celles et tous ceux qui croient sincèrement sont donc les saints dont parle le Nouveau Testament.
A vous toutes et tous aussi qui croyez s’adresse cette autre parole de l’apôtre Paul dans sa lettre aux chrétiens d’Ephèse :
“Ainsi donc, vous n’êtes plus des étrangers ni des gens de passage; mais vous êtes concitoyens des saints, membres de la famille de Dieu. Vous avez été édifiés sur le fondement des apôtres et des prophètes, Jésus-Christ lui-même étant la pierre de l’angle.”
Amen,
Pasteur Eric Kayayan,
.
.
commenter cet article …