Gelobet seist du, Jesu Christ
(Cantate BWV 91)
de Jean Sébastien Bach
Blog Protestant Réformé
Jean Calvin
"Puisque Dieu, par conséquent, nous justifie par la Médiation du Christ, Il nous Acquitte, non pas par l'aveu de notre innocence personnelle, mais par une imputation de la justice ; de sorte que nous, qui sommes injustes en nous-mêmes, sommes considérés comme Justes en Jésus Christ."
Ouvrez votre maison
à l'homme sans asile.
Soyez heureux de partager ;
ne maltraitez pas l'étranger qui,
rongé de chagrin, sur vos terres s'exile...
BM
Par quelle voie, par quels instruments l’Évangile est-il fidèlement transmis depuis deux mille ans ? Une telle transmission est-elle seulement possible, ou bien n’est-elle qu’un leurre, une vue de l’esprit, quelque chose qui ne s’est en fait jamais réalisé mais aurait été (et serait toujours) fantasmé par les générations suivantes ?
La question s’est posée dès le début de l’ère chrétienne à ceux qui proclamaient la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, notamment Paul de Tarse, l’auteur de treize lettres comprises dans le Nouveau Testament, reçues et acceptées par les Églises chrétiennes comme détenant une autorité apostolique authentique, en tant que mandatée et certifiée par celui qui se trouve au centre de l’Évangile, Jésus-Christ lui-même. Cette autorité apostolique, contestée par certains du temps du vivant de Paul, mais rapidement établie par l’ensemble de la chrétienté d’alors, ne pouvait aucunement dépendre de mesures coercitives ou d’un complot quelconque. C’est la nature du message proclamé et son fondement qui l’ont établie. En tant qu’homme, Paul termina sa carrière d’apôtre exécuté sous l’empereur Néron en raison de sa foi en Jésus-Christ comme Seigneur (kurios).
Dans sa seconde lettre à Timothée, rédigée peu avant cette exécution, Paul parle justement de la transmission de l’Évangile qui lui a été confié (ainsi qu’aux autres apôtres du Christ) et il en définit les modalités. Les versets 1 à 13 du second chapitre de cette lettre, cités ici, serviront à préciser ces modalités en cinq points centraux (citation à partir de la version Segond révisée, « La Colombe ») :
Toi donc, mon enfant, fortifie-toi dans la grâce qui est en Christ-Jésus. Et ce que tu as entendu de moi en présence de beaucoup de témoins, confie-le à des hommes fidèles, qui soient capables de l’enseigner aussi à d’autres. Souffre avec moi comme un bon soldat du Christ-Jésus. Il n’est pas de soldat en campagne qui s’embarrasse des affaires de la vie, s’il veut plaire à celui qui l’a enrôlé, et l’athlète n’est pas couronné, s’il n’a combattu suivant les règles. Le laboureur qui peine doit être le premier à recueillir les fruits. Comprends ce que je dis : car le Seigneur te donnera l’intelligence en tout.
Souviens-toi de Jésus Christ, ressuscité d’entre les morts, issu de la descendance de David, selon mon Évangile, pour lequel je souffre jusqu’à être lié comme un malfaiteur. Mais la parole de Dieu n’est pas liée. C’est pourquoi je supporte tout à cause des élus, afin qu’eux aussi obtiennent le salut qui et en Christ-Jésus, avec la gloire éternelle.
Cette parole est certaine :
Si nous sommes morts avec lui,
Nous vivrons aussi avec lui ;
Si nous persévérons,
Nous régnerons aussi avec lui ;
Si nous le renions,
Lui aussi nous reniera ;
Si nous sommes infidèles,
Lui demeure fidèle,
Car il ne peut se renier lui-même.
Antoine de Chandieu (1534-1591), pasteur Protestant du seizième siècle ayant joué un rôle considérable dans l’établissement d’Églises réformées dans le royaume de France, a écrit quelques très belles pages sur ce thème dans son ouvrage La Confirmation de la Discipline Ecclésiastique (1566). En voici quelques extraits pour compléter ces remarques:
« A la vérité nous devons bien reconnaître que Dieu est meilleur que nous pour vouloir ce qui est bon et juste, et qu’il est plus sage que nous pour choisir les moyens qui lui sont propres. Il est certain que ceux qui voient l’Écriture Sainte, ne peuvent ignorer que Dieu a mis cet ordre en son Église, qu’il veut être gardé inviolablement, à savoir qu’un chacun indifféremment et de sa seule autorité ne puisse s’attribuer quelque office ou charge au sein de celle-ci, et particulièrement de prêcher. Mais que cet honneur lui soit réservé d’y appeler ceux qu’il lui plaira. De telle sorte que quiconque pervertit un tel ordre ne puisse être excusé de vouloir diviser l’Église et comme couper les nerfs par lesquels Dieu veut qu’elle demeure debout et en son entier.
Cela nous est enseigné si clairement par l’Apôtre, que ceux qui n’y prennent garde ferment les yeux à leur escient. Jésus-Christ, dit-il, a donné les uns pour être apôtres, et les autres pour être prophètes, les autres évangélistes, les autres pasteurs et docteurs, pour assembler les saints, pour l’œuvre du ministère, pour l’édification du corps du Christ (Éphésiens 4 :11). Donc puisque le Seigneur a mis cette distinction de charges en son Église, il s’ensuit qu’il n’est pas loisible à tout un chacun de s’y entremettre indifféremment. Et même, puisque l’apôtre dit que le Seigneur les a donnés, il déclare assez par cela qu’il est l’auteur d’un tel ordre, et que ceux qui s’ingèrent sans être appelés, contreviennent à son ordonnance. Et à ce propos il dit par ses Prophètes qu’il a constitué sur son peuple des gardes et des guetteurs pour l’avertir de son devoir. Et S. Paul dit des vrais Pasteurs que le Saint Esprit les a mis sur leurs troupeaux pour gouverner l’Église de Dieu (Ésaïe 62 :6 ; Jérémie 6 :17 ; Ezéchiel 33 :7 ; Actes 20 :28).
Il y a assez d’autres passages qui montrent que c’est Dieu qui envoie les annonciateurs de sa parole : comme quant notre Seigneur Jésus-Christ commandait qu’on priât le maître de la moisson afin qu’il y envoie des ouvriers (Matthieu 9 :38). Ce qui n’est pas dit seulement en général, mais aussi nous voyons comment en particulier Dieu a souvent témoigné à ses serviteurs que c’était lui qui les envoyait à son œuvre. Voilà pourquoi tant de fois il commande à Moïse de dire aux Israélites qu’il l’envoyait vers eux pour leur déclarer sa volonté. Il assure Ésaïe de sa vocation, et même par une vision admirable. Il donne du courage à Jérémie, l’assurant qu’il était envoyé par lui. Comme aussi notre Seigneur Jésus-Christ déclare à ses apôtres qu’il les envoie, leur donnant tout de suite après le Saint esprit, par la vertu duquel ils peuvent s’acquitter de leur charge. Et de même quand il apparut à Saint Paul : Je te suis, dit-il, apparu pour te constituer ministre et témoin des choses que tu as vues, et de celles dans lesquelles je t’apparaîtrai, te délivrant du peuple et des Gentils vers lesquels je t’envoie maintenant.
Et certes ce n’est pas sans cause que Dieu a voulu imprimer dans les cœurs de ses serviteurs une pleine certitude de leur vocation, mais afin que par cela ils soient munis et fortifiés contre tant de difficultés par lesquelles il faut qu’ils passent. Car qui sera celui qui ne tremble s’il appréhende à bon escient, et selon la parole de Dieu, le pesant fardeau d’une telle charge ? Est-ce une chose légère d’être ambassadeur pour Christ, messager de Dieu et dispensateur de ses secrets ? Est-ce peu de choses de porter la parole de la réconciliation de Dieu avec les hommes ? Exhorter comme si Dieu lui-même exhortait ? D’annoncer la rémission des péchés aux croyants et la condamnation aux infidèles ? De délier les uns, et lier les autres au jugement de Dieu ? Est-ce une chose humaine d’être le sel de la terre ? La lumière du monde ? Bref d’être la bouche par laquelle le Seigneur parle aux hommes, les mains par lesquelles il s’approche d’eux, afin qu’ils le voient, qu’ils le connaissent et servent selon sa volonté ? Si nous considérons ces choses à bon escient, ne dirons-nous pas avec l’Apôtre : Et qui est suffisant pour ces choses ? Il est certes très nécessaire que ceux auxquels une si grande et difficile charge est commise, cherchent ailleurs qu’en eux-mêmes les choses qui sont requises à leur devoir. Et d’où prendront-ils quelque assurance, sinon de ce qu’ils sont certains et résolus que Dieu les envoie ; et par le même moyen qu’il sera leur garant, qu’il les soutiendra sous le poids d’une si grande charge, qu’il les armera contre les assauts qui leur sont présentés, bref qu’il les pourvoira des choses qui leur sont nécessaires ?
Or, bien que Dieu ait appelé de tout temps ceux qui ont reçu de lui une charge d’enseigner son Église, il n’a cependant pas toujours usé des mêmes moyens pour les y appeler. Car il a envoyé les Prophètes et Apôtres d’une façon extraordinaire, en tant qu’il n’a pas fait usage du suffrage et de l’élection des hommes en leur endroit. Pareillement lorsque l’ordre de l’Église est totalement interrompu, et que la pureté de son service est abolie, selon ce qu’il peut apparaître extérieurement, Dieu suscite extraordinairement des personnes qu’il dote de grâces propres pour rétablir l’ordre de l’Église, et remettre dessus son service en la pureté qui convient. Et comme ce sont des choses extraordinaires, elles n’ont pas toujours lieu en l’Église.
Mais quant aux ministres et Pasteurs, leur charge doit durer en l’Église jusques à la consommation du monde, ayant certains troupeaux qui leur sont assignés, afin qu’ils les nourrissent en la connaissance et crainte par la prédication de sa parole, et l’administration des sacrements qu’il a institués. Et ceux-ci sont appelés de Dieu à leur charge par le moyen des hommes : assavoir par une élection sainte et légitime, telle qu’elle nous est enseignée par la parole de Dieu. Et ainsi, bien qu’ils doivent sentir en leur conscience le témoignage de leur vocation intérieure, il faut néanmoins que la vocation extérieure et ordinaire, selon l’ordre de l’Église, y soit adjointe avant qu’ils puissent s’entremettre d’annoncer l’Évangile. Et voilà pourquoi l’apôtre spécifie et déclare si soigneusement et par le menu les choses requises à un fidèle Pasteur (Timothée 3 :1), afin que par cela l’Église connaisse mieux ceux qu’elle devra élire en une telle charge. Et même écrivant à Tite (1 :7): Je t’ai laissé, dit-il, afin que tu établisses des Anciens par les villes, comme je l’ai ordonné. S’il y a quelqu’un qui soit irrépréhensible, etc. Pour nous faire comprendre premièrement que l’élection a lieu en telle chose, et secondement qu’on doit y procéder avec grande prudence et égard, afin que l’Église soit bien pourvue. A cela appartient la remontrance qui est faite à Timothée (1 Timothée 5 :22), qu’il n’impose pas à la hâte les mains sur aucun, et ne communique point aux péchés d’autrui. Et même, (bien que Timothée doive être plutôt compté au rang des Évangélistes qui ont eu lieu au commencement avec les apôtres, qu’au rang commun des Pasteurs), l’apôtre déclare néanmoins qu’il a été élu à sa charge par l’imposition des mains de la compagnie des anciens (1 Timothée 4 :14). Et suivant cela, il est dit que S. Paul et Barnabas ordonnaient des Pasteurs dans chaque Église avec prières et jeûnes (Actes 14:23).
En somme, il nous apparaît par toute l’Écriture Sainte, qu’excepté les Prophètes, Apôtres, et ceux que Dieu a en certains temps suscités extraordinairement et sans le moyen des hommes, tous les autres qu’il a envoyés pour porter sa parole, ont reçu témoignage de leur vocation par l’ordre de l’Église, qui est comme la main de Dieu, par laquelle il élève les hommes en une telle charge.
Et tout comme Dieu approuve ceux qui avec vocation légitime s’emploient à son service, qu’il les assiste, qu’il bénit leurs labeurs et ratifie au ciel la doctrine qu’ils ont annoncée en la terre : aussi il a de tout temps condamné, rejeté et puni ceux qui sans être envoyés, se sont ingérés en quelque charge ecclésiastique. [exemples tirés de l’Ancien Testament : Jérémie 14 ; 29 :23 ; Ézéchiel 13 :7 ; Nombres. 16 1 ; Samuel 6 ; 13 ; 2 Sam. 6 ; 2 Chroniques 26].
Tous ces exemples sont suffisants pour nous retenir en notre devoir, afin que nous ne nous avancions pas outre ce qui nous sera commandé par Dieu. Car estimons-nous que si après tant de défenses, de menaces, de punitions rigoureuses contre ceux qui ont commis de telles fautes, on veut néanmoins violer et pervertir l’ordre que Dieu a établi, une telle audace et témérité puisse demeurer impunie ? Que donc l’enseignement de l’Apôtre aux Hébreux nous contienne enserrés dans les limites de notre vocation, quand parlant de la sacrificature, il dit que nul ne prend l’honneur à soi-même sinon celui qui est appelé par Dieu (Hébreux 5 :4). Comme aussi quand Saint Paul parle de la prédication de l’Évangile : Comment entendra-t-on, dit-il, sans prédication ? Et comment prêchera-t-on sinon qu’on soit envoyé ? (Romains 10 :14-15), montrant par cela que nul ne doit s’avancer pour prêcher la parole de Dieu, sinon celui à qui Dieu aura ouvert la bouche, l’appelant à un tel office. Et c’est la raison pourquoi les serviteurs de Dieu ont tant de fois allégué leur vocation, tant pour témoigner qu’ils ne s’étaient pas ingérés d’eux-mêmes, qu’aussi pour rendre les hommes plus attentifs et obéissants à la doctrine qu’ils annonçaient. Ainsi, Ésaïe, Jérémie, Ézéchiel, Zacharie, et les autres disent qu’ils sont envoyés. Ainsi Saint Paul déclare qu’il est constitué héraut pour annoncer l’Évangile. Ainsi Jésus-Christ lui-même témoigne qu’il est envoyé, et que ce qu’il fait est selon la charge qui lui est commise. »
Amen,
Eric Kayayan,
Pasteur Protestant Réformé
Texte : Jean Calvin
Joyeux Noël
à toutes et tous !
Bonne fête de la Nativité !
Que Dieu bénisse
Chacune et chacun d'entre vous !
Refuge Protestant
Gelobet seist du, Jesu Christ
(Cantate BWV 91)
de Jean Sébastien Bach
Louange à toi, Jésus-Christ, pour être né homme d'une vierge, en vérité, c'est ce dont se réjouit l'armée des anges. L'éclat de la magnificence du Très-haut, l'image même de Dieu, a à l'heure fixée, pris demeure. L'enfant unique du Père éternel, lumière éternelle née de la lumière, se trouve maintenant dans la mangeoire. O hommes, contemplez donc ce qu'a fait ici la puissance de l'amour ! Dans notre pauvre corps fait de chair et de sang ! Celui-ci n'était il pas maudit, condamné, perdu ? L'éternelle bonté est vêtue. Ainsi recevra-t-il bénédiction. Dieu, pour qui le globe terrestre est trop petit, que ni la terre ni le ciel ne peuvent contenir, se révèle dans une petite crèche. Si la lumière éternelle nous rejoint ainsi, Dieu ne pourra dorénavant plus nous prendre en haine, nous qui sommes les enfants de cette lumière. Ah Peuple chrétien, allons, prépare-toi à recevoir chez toi le Créateur ! Le Puissant Fils de Dieu s'invite chez toi. Ah laisse ton cœur être touché par cet amour ; Il vient à toi pour te guider à travers cette vallée de larmes à son Trône. La misère que Dieu assume, nous a vraiment désigné un salut éternel, la surabondance des trésors célestes. En se faisant homme, il te fait participer à la splendeur des anges. Il t'installe dans leur chœur. Tout cela, Il l'a fait pour nous montrer l'immensité de son amour. Le Peuple Chrétien tout entier s'en réjouit et lui en est reconnaissant pour l'éternité.
Car un enfant nous est né, un fils nous est donné, et le gouvernement sera sur son épaule ; et son nom sera appelé merveilleux conseiller, le Dieu puissant, le père éternel, le prince de la paix.
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Ré-écrire la Bible au goût du jour
La réécriture de la Bible est à l’ordre du jour, et la rédaction virtuelle d’un évangile apocryphe est devenue particulièrement d’actualité, au moyen de la déconstruction par élimination et la recomposition graduelle du message de l’Évangile. Ceci n’est d’ailleurs que le parallèle logique de la popularité croissante des évangiles apocryphes des premiers siècles de l’ère chrétienne qui font, aujourd’hui comme à l’époque, concurrence aux évangiles du Nouveau Testament aux yeux du grand public, par le biais de nombreux articles ou publications. Par apocryphes j’ai en vue une série de textes plus ou moins calqués sur les évangiles du Nouveau Testament mais rédigés après ces derniers : évangile de Pierre – déjà cité dans la seconde lettre de Clément de Rome à la fin du premier siècle -; évangile de Thomas, consistant en 118 logia ou paroles attribuées à Jésus; évangile de l’enfance de Jésus-Christ par Thomas; protévangile de Jacques; actes de Pilate, etc. (on consultera avec profit le recueil Évangiles apocryphes publié par France Quéré – Collection Sagesse, Paris, Seuil, 1983 – qui en rassemble un certain nombre).
En introduisant toutes sortes de fantaisies, d’exagérations, de spéculations mystiques, en prenant pour prétexte la recherche d’une spiritualité supérieure, ils déforment le sens des évangiles du Nouveau Testament, abolissant de fait la signification du salut par la foi en l’œuvre de réconciliation accomplie une fois pour toutes sur la Croix par le Christ, seul médiateur entre Dieu et l’humanité en état de chute.
Aujourd’hui, cette réécriture virtuelle de la Bible, en particulier du Nouveau Testament, provient du sein même des églises qui récusent implicitement – voire explicitement – l’autorité de la Bible en tant que Révélation afin de s’attacher à leur propre canon, en tant que source d’autorité conçue pour s’adapter étroitement à l’idéologie dominante ou aux décisions politiques du moment. Une telle réécriture virtuelle de la Bible mérite d’être mise en évidence, dans la mesure où elle instaure un nouveau canon aux profondes conséquences dogmatiques et éthiques pour l’Église d’aujourd’hui. C’est ce que je me propose ici de faire de manière synthétique.
Le Canon marcionite
Un retour s’impose sur l’histoire du christianisme des origines, dont la connaissance peut certainement nous aider à nous y retrouver dans la confusion éthique et doctrinale actuelle.
Déjà au second siècle de notre ère, un certain Marcion, fortement influencé par les sectes dites gnostiques (du mot grec « gnosis », qui signifie connaissance – une connaissance réservée aux pneumatikoi, élite initiée de gens soi-disant « spirituels »), constitue un canon de l’Écriture débarrassé de la totalité de l’Ancien Testament et de tout ce qui peut ressembler à un Dieu Créateur. Celui-ci est en effet assimilé à un mauvais démiurge (« Yaldabaoth-Yahweh » dans certaines terminologies gnostiques de l’époque), c’est-à-dire à une forme inférieure de divinité, puisqu’il est impliqué dans la création de la matière. Or, pour les Gnostiques, la matière est en elle-même mauvaise, elle se situe à l’opposé de ce qui est vraiment « spirituel ». L’union homme/femme et la procréation qu’elle implique font partie de cette « mauvaise » création (d’où l’appel à l’abstinence totale au sein du mariage, voire au rejet du mariage comme institution chez de nombreux gnostiques). Marcion supprime même plusieurs passages du seul évangile qu’il maintient dans son canon, celui selon Luc, notamment ce qui a trait à la naissance de Jésus, l’annonce faite à Zacharie dans le temple etc.: il les juge en quelque sorte « impropres à la consommation » dans la mesure où ils se réfèrent à l’Ancien Testament dans lequel se manifeste justement Yahweh le démiurge, qu’il oppose à une divinité d’ordre supérieur, le vrai Dieu en quelque sorte.
L’autre élément expurgé du canon marcionite – même au sein des épîtres pauliniennes qu’il a retenues – concerne tout ce qui se rapporte à la Loi, et qu’il estime s’opposer à la seule véritable dimension spirituelle, celle de la Grâce délivrée de tout aspect légal. Marcion n’introduit pas en tant que tels un ou plusieurs des évangiles apocryphes mentionnés ci-dessus. Il découpe plutôt ce qui lui semble s’accorder avec l’essence du message chrétien dans des textes déjà reçus et tenus pour inspirés par la majorité des églises, les élaguant en fonction de ses choix doctrinaux. Soulignons en effet que dès le début de l’ère chrétienne, outre l’Ancien Testament (comprenant la Torah, les écrits – ketubim – et les prophètes – nebiim -) des écrits récents bien particuliers, tels les épîtres pauliniennes, étaient reçus par les églises comme étant propres à la lecture dans les assemblées en raison de leur origine apostolique ou de l’autorité interne du témoignage qu’ils rendent à l’Évangile de Jésus-Christ (c’est d’ailleurs ce qu’indique clairement la longue citation d’Irénée donnée ci-dessous)
Il est fort instructif à plusieurs égards de constater que des pères de l’Église comme Tertullien ou Irénée de Lyon ont combattu dans les termes les plus vifs ce canon marcionite et ce qu’il implique par rapport à l’ordre créationnel bon et parfait institué par Dieu, de même que par rapport à la relation entre la Loi et l’Évangile. Cela même alors que le Canon du Nouveau Testament tel que nous l’avons reçu (avec ses 27 livres) n’était pas encore constitué de manière générale en tant que tel. Rappelons en effet qu’il ne le sera que vers la fin du quatrième siècle, étant progressivement reconnu par les églises qui furent incitées à le faire notamment à la suite de la constitution du canon marcionite. Tertullien – dans Adversus Marcionem, notamment au livre IV portant sur l’évangile selon Luc et sa version marcionite – de même qu’Irénée défendent avec la plus grande vigueur la canonicité – et donc l’autorité – de la Loi et des prophètes, de l’Ancien Testament donc.
Le jugement d’Irénée de Lyon
Voici par exemple ce qu’écrit Irénée de Lyon sur Marcion et, à sa suite, sur la secte des Encratites, dans son traité « Contre les hérésies, dénonciation et réfutation de la gnose au nom menteur » (I, 27, 2-4 ; 28, 1. Trad. Française par Adelin Rousseau, Paris, Cerf, 1984, p. 118-121). Ce long extrait nous permettra de cerner les thèmes communs que l’on retrouve aujourd’hui dans le nouveau canon adopté par nombre d’églises:
[Cerdon] eut pour successeur Marcion, originaire du Pont, qui développa son école en blasphémant avec impudence le Dieu annoncé par la Loi et les prophètes : d’après lui, ce Dieu est un être malfaisant, aimant les guerres, inconstant dans ses résolutions, et se contredisant lui-même. Quant à Jésus, envoyé par le Père qui est au-dessus du Dieu Auteur du monde, il est venu en Judée au temps du gouverneur Ponce-Pilate, procurateur de Tibère César ; il s’est manifesté sous la forme d’un homme aux habitants de la Judée, abolissant les prophètes, la Loi et toutes les œuvres du Dieu qui a fait le monde et que Marcion appelle aussi le Cosmocrator. En plus de cela Marcion a fait croire à ses disciples qu’il est plus véridique que les apôtres qui ont transmis l’Évangile, alors qu’il met entre leurs mains, non pas l’Évangile, mais une simple parcelle de l’Évangile. Il mutile de même les épîtres de l’Apôtre Paul, supprimant tous les textes où l’Apôtre affirme de façon manifeste que le Dieu qui a fait le monde est le Père de notre Seigneur Jésus-Christ, ainsi que tous les passages où l’Apôtre fait mention de prophéties annonçant par avance la venue du Seigneur.
Selon Marcion, il n’y aura de salut que pour les âmes seulement, pour celles du moins qui auront appris son enseignement ; quant au corps, du fait qu’il a été tiré de la terre, il ne peut avoir part au salut. A son blasphème contre Dieu, il ajoute encore, en vrai porte-parole du diable et en contradicteur achevé de la vérité, l’assertion que voici : Caïn et ses pareils, les gens de Sodome, les Égyptiens [en tant qu’adeptes de pratiques magiques] et ceux qui leur ressemblent, les peuples païens qui se sont vautrés dans toute espèce de mal, tous ceux-là ont été sauvés par le Seigneur lors de sa descente aux enfers, car ils sont accourus vers lui et il les a pris dans son royaume ; au contraire, Abel, Hénoch, Noé et les autres « justes », Abraham et les patriarches issus de lui, ainsi que tous les prophètes et tous ceux qui ont plu à Dieu, tous ceux-là n’ont point eu part au salut : voilà ce qu’a proclamé le Serpent qui résidait en Marcion ! (…)
Puisque ce Marcion est le seul qui ait eu l’audace de mutiler ouvertement les Écritures et qu’il s’est attaqué à Dieu plus impudemment que tous les autres, nous le contredirons séparément : nous le convaincrons d’erreur à partir de ses écrits et, Dieu aidant, nous le réfuterons à partir des paroles du Seigneur et de l’Apôtre qu’il a conservées et qu’il utilise. Pour l’instant il nous faut faire mention de lui, pour que tu saches que tous ceux qui, de quelque manière que ce soit, adultèrent la vérité et blessent la prédication de l’Église, sont les disciples et les successeurs de Simon, le magicien de Samarie. Bien que, dans le but de tromper autrui, ils se gardent d’avouer le nom de leur maître, c’est pourtant sa doctrine qu’ils enseignent ; ils mettent en avant le Nom du Christ Jésus comme un appât, mais c’est l’impiété de Simon qu’ils propagent sous des formes diverses, causant ainsi la perte d’un grand nombre ; par ce Nom excellent, ils répandent leur détestable doctrine ; sous la douceur et la beauté de ce Nom, ils présentent le venin amer et pernicieux du Serpent, qui fut l’initiateur de l’apostasie.
A partir de ceux que nous venons de dire ont déjà surgi les multiples ramifications de multiples sectes, par le fait que beaucoup parmi ces gens-là – ou pour mieux dire, tous – veulent être des maîtres: quittant la secte dans laquelle ils se sont trouvés et échafaudant une doctrine à partir d’une autre doctrine, puis encore une autre à partir de la précédente, ils s’évertuent à enseigner du neuf, en se donnant eux-mêmes pour les inventeurs du système qu’ils ont ainsi fabriqué.
Ainsi par exemple, des gens qui s’inspirent de Saturnin et de Marcion et qu’on appelle les Encratites ont proclamé le rejet du mariage, répudiant l’antique ouvrage modelé par Dieu et accusant de façon détournée Celui qui a fait l’homme et la femme en vue de la procréation ; ils ont introduits l’abstinence de ce qu’ils disent animé, ingrats qu’ils sont envers le Dieu qui a fait toutes choses (…)
D’autres, en revanche, ont pris comme point de départ les doctrines de Basilide et de Carpocrate ; ils ont introduit les unions libres, les noces multiples, l’usage indifférent des viandes offertes aux idoles : Dieu, disent-ils, n’a cure de tout cela. Et que sais-je encore ? Car il est impossible de dire le nombre de ceux qui, d’une manière ou d’une autre, se sont écartés de la vérité.
Apparemment, Irénée n’était pas un chrétien tolérant et pluraliste se félicitant de la diversité d’opinions et de points de vue censée manifester une grande richesse au sein d’une Église unie!
Démythologisation contemporaine et transgénèse du Canon
Le processus contemporain de déconstruction du message de l’Évangile débute en prenant le contrepied d’une affirmation du Nouveau Testament sur l’authenticité de ce même message. En 2 Pierre 1:16-18 on lit ceci:
Ce n’est pas en effet en suivant des fables [en grec: μύθοι, mythes) habilement conçues que nous vous avons fait connaître la puissance et l’avènement de notre Seigneur Jésus-Christ, mais parce que nous avons vu sa majesté de nos propres yeux; car il a reçu honneur et gloire de Dieu le Père, quand la gloire pleine de majesté lui fit entendre cette voix: Celui-ci est mon Fils bien-aimé, objet de mon affection. Nous avons entendu cette voix venant du ciel, lorsque nous étions avec lui sur la sainte montagne.
Au début de la première lettre à Timothée (1:3-4), Paul exhorte Timothée à ne pas laisser certains enseigner des fables et des généalogies sans fin: Comme je t’y ai exhorté, à mon départ pour la Macédoine, demeure à Ephèse, afin de recommander à certaines personnes de ne pas enseigner d’autres doctrines et de ne pas s’attacher à des fables (ici aussi μύθοι, mythes] qui favorisent des discussions plutôt que l’œuvre de Dieu dans la foi. Sans entrer dans les détails sur la nature et le contenu de ces « fables » il est clair que ces deux passages établissent une distinction voire une antithèse radicale entre d’une part les fables/mythes contemporains (qu’ils soient judaïsants ou gréco-romains) et d’autre part les faits historiques sur lesquels l’annonce de l’Évangile est fondée, ainsi que cette annonce.
Or en développant une méthode de « démythologisation » pour éliminer tout ce qu’elle considère justement comme des fables dans la Bible (par exemple les miracles dans le Nouveau Testament, ou, ici, la Transfiguration de Jésus devant trois de ses disciples [Mat.17:1-8; Marc 9:2-13; Luc 9 :28-36]) la théologie héritée des Lumières du dix-huitième siècle se voit progressivement contrainte – si elle veut maintenir vivante cette appellation de « théologie » au sein de la tradition chrétienne dont elle est issue et perpétuer une pratique théologique appliquée à la vie de l’Église – de définir un nouveau Canon, avalisant les accents dogmatiques ou éthiques qu’elle s’est donnée. Elle se retrouve donc en porte-à-faux avec le Canon reçu par l’Église universelle au cours des siècles. Elle en a cependant encore besoin et cherche à s’en servir comme d’un tremplin destiné à faire atteindre l’étape canonique suivante et la faire accepter progressivement au sein de l’Église.
Les processus de cette ré-écriture de l’Écriture sont multiformes, et par là-même peuvent être trompeurs dans la mesure où – tout comme du temps des différentes sectes gnostiques mises en évidence et dénoncées par Irénée – on a affaire à un mouvement protéiforme susceptible d’évoluer et de s’adapter à de nouveaux courants ou de nouvelles exigences socio-culturelles. L’historisme contemporain, c’est-à-dire l’absolutisation du temps historique auquel est faussement conférée une dimension transcendante et normative (le fameux « Sens de l’Histoire » si l’on veut), sert néanmoins de matrice à ce courant protéiforme orienté avant tout vers la satisfaction fonctionnaliste des besoins existentiels du moment. De mutations en mutations, toutes provoquées consciemment afin de donner lieu à une transgénèse jugée salutaire pour la survie de l’homo religiosus contemporain, on aboutit donc imperceptiblement à ce qu’on pourrait qualifier de CGM : un Canon Génétiquement Modifié.
L’idée d’un Canon modifié, purgé des éléments jugés mythologiques (non pas ceux récusés par les lettres de Paul et de Pierre, mais ceux jugés comme tels par les censeurs des évangiles canoniques) émerge déjà au cœur des « Lumières » avec la fameuse bible du déiste et moraliste Thomas Jefferson, l’un des rédacteurs de la constitution américaine et le troisième président des États-Unis. Il s’agit en fait d’une version du Nouveau Testament expurgée, qui ne fut portée à la connaissance du public que bien longtemps après la mort de Jefferson. Les passages mentionnant les miracles de Jésus, l’annonciation, la résurrection, le Saint Esprit, le péché etc. ont été découpées par Jefferson au rasoir, et le tout recomposé sous le titre : The life and morals of Jesus of Nazareth (La vie et les enseignements moraux de Jésus de Nazareth).
Un exemple contemporain de ré-écriture de l’Évangile nous vient du Jesus seminar, animé par John Dominic Crossan (un ex-prêtre catholique irlando-américain) et Robert Funk. Il est du reste assez significatif de constater que Crossan considère la rédaction de l’évangile de Pierre – un des évangiles apocryphes mentionnés ci-dessus – comme précédant chronologiquement celle des évangiles canoniques. Afin de se rapprocher du « Jésus historique » (le soi-disant véritable Jésus débarrassé des oripeaux mythologiques dont l’auraient affublés les évangiles canoniques) le Jesus Seminar invitait entre autres ses participants à lire séparément les évangiles canoniques en entourant de couleurs différentes les paroles de Jésus en fonction de leur degré supposé d’authenticité, selon des critères donnés. Les chercheurs comparaient ensuite leurs trouvailles pour en faire une synthèse et publier ensuite leurs vues sur le « Jésus historique ». Une telle méthode aux accents extrêmement subjectifs, ne peut naturellement manquer de faire venir à l’esprit la sympathique formule : je t’aime: un peu, beaucoup, passionnément, à la folie, pas du tout appliquée aux choix opérés par les uns ou les autres…
Il n’est cependant pas nécessaire d’avoir affaire à une réécriture contemporaine de type marcionite, – proposant au lecteur un texte formellement mutilé et recomposé – pour que cette réécriture ait effectivement lieu. La réécriture apocryphe par nombre d’églises aujourd’hui tient le plus souvent de l’abandon voire de l’occultation de tous les passages bibliques considérés comme obsolètes en raison d’une évolution socio-culturelle guidée par des motifs intrinsèques opposés à ceux que les textes du Canon traditionnel affirment ou font ressortir. Notons quelques symptômes de cet état de fait, suffisamment répandus pour motiver cette assertion: ces passages ne sont plus lus lors des offices ou des cultes ; on ne prêche plus (ou bien très rarement) sur l’Ancien Testament ; le Décalogue est relégué au rang d’objet de musée ; dans la prédication la pratique de l’exégèse est négligée et remplacée par toutes sortes de considérations moralisantes ou de citations littéraires voire philosophiques. L’exposition historico-rédemptrice des passages la Bible n’est plus pratiquée et l’histoire de la Révélation tout simplement abandonnée. En revanche, des citations bibliques prises hors de leur contexte canonique particulier et général se font de plus et plus courantes (ce que l’on nomme « biblicisme »).
Le motif universaliste et le motif antinomien
A contrario, un motif universaliste affirmant le salut de tout individu – qu’il soit régénéré par l’Esprit Saint ou non – devient un principe herméneutique (interprétatif) dominant dans l’exposition de thèmes divers, d’ordre éthique en particulier. La pression socio-culturelle égalitariste contemporaine rend en effet insupportable tout maintien de mentions discriminatoires à l’égard du salut, sans aucun égard pour les textes néo-testamentaires, même limités aux paroles de Jésus-Christ pourtant sans équivoque à cet égard (comme en Mat. 7:21-23; 22:14; 25:31-46 etc.)
La démarche suivie peut être résumée comme suit : on commence par allégoriser les textes au moyen d’une herméneutique spiritualiste afin de mieux les réduire à une simple morale immanente, dénuée de tout caractère eschatologique inclusive d’un Jugement final. Une fois cette étape atteinte, le résidu de morale biblique obtenu se trouve à son tour relégué au rang des scories de l’histoire lorsque de nouveaux impératifs sociétaux ou anthropologiques ont été définis, et avec eux quasiment toute notion biblique de bien et de mal redéfinie. Le bien et le mal sont désormais connus avec une nouvelle certitude – une foi qui désormais ne doute plus ! – par l’homo religiosus contemporain, non plus régénéré par la Parole et l’Esprit, mais auto-promu au rang d’homo emancipatus, émancipé de l’autorité paternelle (selon l’étymologie de cet adjectif en droit romain).
S’il faut chercher une inspiration derrière ce nouveau canon universaliste, c’est plutôt dans la pop-culture et les mouvements de masse branchés que le nouvel évangile apocryphe va la puiser. Par exemple dans la fameuse chanson de Polnareff des années soixante-dix :
On ira tous au paradis mêm’ moi
Qu’on soit béni ou qu’on soit maudit, on ira
Tout’ les bonn’ ssoeurs et tous les voleurs
Tout’ les brebis et tous les bandits
On ira tous au paradis
On ira tous au paradis, mêm’ moi
Qu’on soit béni ou qu’on soit maudit, on ira
Avec les saints et les assassins
Les femmes du monde et puis les putains
On ira tous au paradis
Ne crois pas ce que les gens disent
C’est ton cœur qui est la seule église
Laisse un peu de vague à ton âme
N’aie pas peur de la couleur des flammes de l’enfer
On ira tous au paradis, mêm’ moi
Qu’on croie en Dieu ou qu’on n’y croie pas, on ira…
Qu’on ait fait le bien ou bien le mal
On sera tous invités au bal
On ira tous au paradis
On ira tous au paradis, mêm’ moi
Qu’on croie en Dieu ou qu’on n’y croie pas, on ira
Avec les chrétiens, avec les païens
Et même les chiens et même les requins
On ira tous au paradis…
Au sein du nouvel évangile apocryphe, le corollaire du motif universaliste est le motif antinomien, l’antinomisme étant essentiellement opposé à toute notion de Loi limitative. Ainsi, pour ce motif, la Grâce suppose l’abolition de la Loi (au lieu de la délivrance par le Christ de la malédiction que la Loi amène sur l’homme pécheur incapable de satisfaire à ses exigences). L’Évangile n’est plus l’accomplissement de la Loi, selon les paroles mêmes du Christ (Matt. 5:17-20 et jusqu’à la fin du chapitre 5 où l’esprit de la Loi est en fait révélé dans toute sa portée, radicale et insoupçonnée par ceux-là mêmes qui s’en réclamaient de manière purement formaliste). Il devient donc quasiment interdit d’interdire au motif fallacieux d’une liberté qui ne connaît de bornes que celles posées par homo emancipatus.
L’antinomisme ne se positionne pas seulement par rapport à la Loi mosaïque, mais par rapport à toute prise en compte des aspects normatifs dans la Création, avant même la Chute. Car Homo emancipatus est libre de toute entrave, en particulier dans l’exercice de sa sexualité (une thématique particulièrement d’actualité dans les débats contemporains au sein des églises, mais déjà présente à l’époque d’Irénée, comme en témoigne le dernier paragraphe de la citation donnée plus haut – sans même parler de textes néo-testamentaires tels que 2 Pierre 2:18-19): toute norme limitative à l’égard de cet exercice – quand bien même elle apparaîtrait à travers toute l’Écriture – constitue une contradiction du principe régissant la pensée et les actes d’homo emancipatus.
Les similarités avec la doctrine marcionite
Si nous reprenons les thèmes propulsés par le canon marcionite et ceux du nouveau canon (avec l’évangile apocryphe qui lui sert de support), tel qu’on vient de l’esquisser, on retrouve les éléments communs suivants :
Par quelle autorité?
La présence d’un Canon dans l’Église – quel qu’il soit du reste – pose nécessairement la question de l’autorité par laquelle une prédication, un enseignement, des règles de conduite sont donnés. Car tout enseignement et pratique dans l’Église ne se justifie que par rapport à une règle, une mesure, une norme acceptées et crues comme dignes de confiance et conformes à la vérité (c’est du reste la signification initiale du mot canon). Ce ne peut-être qu’au nom d’une autorité quelconque que parle et agit l’Église. Cette question cruciale était déjà au centre du débat qui nous est rapporté en Matthieu 21:23-32, entre Jésus et les principaux sacrificateurs ainsi que les anciens du peuple: Par quelle autorité fais-tu cela et qui t’a donné cette autorité ? La réponse de Jésus – qui se réfère à Jean Baptiste venu dans la voie de la justice et au baptême de repentance pratiqué par lui et cru par les péagers et les prostituées (v.32) – pointe clairement en direction soit du ciel, soit des hommes. Dans la mesure où Jésus-Christ déclare à ses disciples que toute autorité (πασα ἐξουσία) lui a été donnée dans les cieux et sur la terre, et qu’il leur enjoint d’enseigner à toutes les nations tout ce qu’il leur a prescrit (Matt. 28:18-20), il est impératif que l’Église, du moins celle qui prétend être son corps, se pose avec acuité la question de la source de l’autorité de son enseignement: l’Évangile qu’elle prêche vient-il du ciel ou des hommes? Et le Canon qui l’exprime est-il donné une fois pour toutes, ou bien est-il malléable à merci ?
Car je n'ai point honte de l'Evangile :
c'est une puissance de Dieu
pour le salut de quiconque croit,
Romains 1 : 16
Un Indien était membre d'un gang de cambrioleurs. Il avait l'habitude de fumer et roulait lui même ses cigarettes.
Un jour, en cambriolant une maison, il remarqua un petit livre noir dont les pages étaient très fines, idéales pour faire ses cigarettes.
Le prenant, chaque soir, il déchirait une page, la roulait autour d'un peu de tabac et la fumait !
Ayant remarqué que les mots sur les pages étaient écrits dans sa langue, il commença à les lire avant de rouler le papier.
Un soir après avoir lu une page, il s'agenouilla à terre et, confondu par la sainteté de Dieu, il demanda pardon pour ses péchés.
Il voulut s'en sortir et changer de vie.
Il se rendit à la police à l'étonnement de tous.
Le brigand qu'il était devint un prisonnier du Christ dans toute l'essence que représente cette définition.
En prison, où il purgeait sa peine, il parla du Fils de Dieu à ses codétenus.
Plusieurs d'entre eux crurent, eux aussi, à ce Puissant Sauveur et Sa Parole.
Ce Livre bien sûr était la Bible. L'Evangile comme l'apôtre Paul l'avait expérimenté, fut pour cette âme la puissance de Dieu pour son salut. Comme pour lui, le Christ est puissant pour pardonner les péchés et transformer toute vie. Il suffit de lui demander.
De Martine Fleck,
Charles Spurgeon
" J'avoue que je donnerais à peine un penny pour tout salut que je pourrais perdre. La vie éternelle est la chose dont nous avons besoin, la Vie de Dieu, qui ne peut jamais changer ou être enlevée de nous, et c'est ce qui est donné à toutes celles et ceux qui croient en Jésus Christ."